En Espagne 🇪🇸, le cĂ©lèbre restaurant elBulli rouvre… comme musĂ©e

Crédit : © LLUIS GENE/AFP


Des plats Ă  dĂ©guster… avec les yeux: douze ans après sa fermeture, le cĂ©lèbre restaurant espagnol elBulli, longtemps considĂ©rĂ© comme l’un des meilleurs du monde, rouvre ses portes mais sous la forme d’un musĂ©e dĂ©diĂ© Ă  la rĂ©volution culinaire menĂ©e par son chef, Ferran AdriĂ .

Niché dans une crique de la Costa Brava, à quelques encablures de la frontière française, le musée, qui ouvrira le 15 juin, a été baptisé elBulli1846, en référence au nombre de créations culinaires de ce temple de la haute gastronomie, triplement étoilé par le guide Michelin en 1997.

« Il ne s’agit pas de venir manger mais de comprendre ce qu’il s’est passĂ© » dans ce laboratoire de la cuisine molĂ©culaire, explique Ă  l’AFP Ferran AdriĂ , 61 ans, assis Ă  deux pas de ce qui fut sa cuisine durant plus de 25 ans.

A l’intĂ©rieur du restaurant, le temps semble avoir Ă©tĂ© suspendu.

Une dĂ©ambulation de plus de deux heures permet au visiteur de dĂ©couvrir des centaines de photos, schĂ©mas, maquettes, carnets, livres et trophĂ©es. Et, cerise sur le gâteau, des reproductions – selon la technique japonaise du « shokuhin sampuru » qui utilise plastique ou rĂ©sines – de plats qui ont fait la renommĂ©e avant-gardiste d’elBulli.

 

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Le chef espagnol Ferran Adria au musĂ©e « elBulli1846 », le 24 mai 2023 Ă  Roses, près de Barcelone. (CrĂ©dit : © LLUIS GENE/AFP)

 

« Nous avons cherchĂ© les limites de l’expĂ©rience gastronomique. Les limites physiques, mentales et mĂŞme spirituelles de l’ĂŞtre humain. Cette quĂŞte a ouvert la voie Ă  d’autres », se fĂ©licite le chef.

La fondation crĂ©Ă©e pour prĂ©server son hĂ©ritage a investi 11 millions d’euros dans ce musĂ©e dont le projet d’agrandissement initial avait suscitĂ© l’opposition de groupes Ă©cologistes.

Une réflexion sur le goût

Ferran Adrià se souvient encore du jour où, en 1983, il a emprunté pour la première fois le chemin de terre sinueux qui reliait alors le village de Roses au restaurant, baptisé elBulli en référence à la passion de sa propriétaire pour les bouledogues français.

 

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Le chef espagnol Ferran Adria avec les « Bullinanos », sculptures Ă  l’effigie de bouledogues français ayant donnĂ© leur nom au restaurant « elBulli », le 24 mai 2023 Ă  Roses, près de Barcelone (CrĂ©dit : © LLUIS GENE/AFP)

 

Venu sur les recommandations de l’un de ses camarades du service militaire, AdriĂ  avait prĂ©vu de n’y rester que le temps d’un stage.

Il deviendra quatre ans plus tard le chef de l’Ă©tablissement, disposant alors d’une Ă©toile Michelin, et finira par le racheter en 1990 avec son associĂ© Juli Soler, mort en 2015.

« La chose la plus importante qui me soit arrivĂ©e Ă  elBulli, c’est que, pour la première fois, j’y ai vu la passion de la cuisine. Ă€ table, lorsque nous mangions en Ă©quipe, nous ne parlions pas de football, pas de nos week-ends, nous parlions de cuisine », se souvient celui qui, enfant, rĂŞvait de suivre les traces de son idole, l’attaquant nĂ©erlandais du FC Barcelone, Johan Cruyff.

 

Reproductions en plastique de plats autrefois servis au restaurant elBulli, transformé en musée, le 24 mai 2023 à Roses, près de Barcelone. (Crédit : © LLUIS GENE/AFP)

 

Des centaines de cuisiniers – dont les futures stars RenĂ© Redzepi, JosĂ© AndrĂ©s ou Andoni Aduriz – ont fait leurs armes parmi l’Ă©quipe de 70 personnes assurant, six mois par an, une cinquantaine de couverts Ă  chaque service sans vouloir plaire Ă  tout prix aux clients venus du monde entier.

« Le concept d’aimer (les plats) quand on fait une cuisine d’avant-garde est très complexe », explique Ferran AdriĂ , qui voulait que ses crĂ©ations provoquent « choc après choc » mais aussi une « rĂ©flexion » sur le goĂ»t.

Trouver ses limites

HĂ©raut de la cuisine molĂ©culaire, AdriĂ  n’a pas fait que des adeptes, notamment parmi les puristes. Mais n’a jamais Ă©tĂ© dissuadĂ© de repousser – et de trouver en 2011 – ses limites.

« J’Ă©tais certain que nous faisions bien de fermer. Nous avions atteint ce que nous considĂ©rions comme l’expĂ©rience de satisfaction ultime. Une fois ce but atteint, nous nous sommes dit +pourquoi continuer si notre mission Ă©tait de chercher les limites?+ », raconte-t-il.

 

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Le chef espagnol Ferran Adria devant des unes de magazines, le 24 mai 2023 au musĂ©e « elBulli1846 », Ă  Roses, près de Barcelone. (CrĂ©dit : © LLUIS GENE/AFP)

 

Il a depuis troquĂ© le tablier blanc pour un t-shirt noir et compte bien laisser sa toque au placard, arguant sans vanitĂ© qu’il lui serait « impossible » de rĂ©pĂ©ter ses exploits.

« Quand les convives venaient, c’Ă©tait un choc, aujourd’hui ce ne serait plus pareil », ajoute-t-il.

Mais il affirme soutenir ceux qui continuent de chercher les limites, « car s’il n’y avait pas ces trois, quatre ou cinq personnes dans le monde qui les cherchent, tout s’arrĂŞterait ».


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