Panafricanisme culinaire : faisons de la diversité gastronomique un atout unificateur !

Illustration : © Bela Jude / Le Temps (Suisse)


Si le panafricanisme fut incarné par le premier président du Ghana, Kwame Nkrumah (1960-1966) et Julius Nyerere, premier chef d’Etat de la Tanzanie ainsi que le militant martiniquais Frantz Fanon; la vision très nationalisante — le projet de construire des états nations — de la majorité des chefs d’États africains dans les années 1960 (Ex: Léopold Sédar Senghor, président du Sénégal entre 1960 et 1980 ou encore Félix Houphouët-Boigny, dirigeant de la Côte d’Ivoire pendant 33 ans voire même Habib Bourguiba, premier président de république tunisienne de 1956 jusqu’à 1987) a fini par freiner cet élan fédérateur. Les professionnels des métiers de bouche et les agitateurs culinaires africains peuvent-ils réussir là où les politiques ont échoué? 


Avec 54 États souverains, le continent africain présente une grande diversité de climats : tempéré pour les pays méditerranéens avec des étés chauds et secs et des hivers frais et humides, semi-aride voire aride au nord avec des températures très élevées et une pluviosité très faible, équatorial au centre et près des zones côtières, tropical humide à la périphérie de la région équatoriale et tropical tempéré avec un climat et un hiver secs dans une grande partie de l’Afrique australe.

 

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Ce large spectre des climats nous offre une immense diversité au niveau de la faune et la flore qui se traduit par une richesse au niveau des produits des terroirs.

Et qui dit multitude de produits de terroirs, dit des cuisines africaines aux goûts influencées par de nombreuses cultures différentes et une grande variété de saveurs dans les cinq régions du continent: Afrique du Nord, Afrique de l’Ouest, Afrique centrale, Afrique de l’Est et Afrique australe.

Découvrons ensemble les trésors culinaires de nos cuisines africaines.

Afrique du Nord

Des plats relevés à la harissa en Tunisie aux mets sucrés-salés et subtilement épicés au gingembre au royaume chérifien (Maroc), la cuisine nord-africaine offre une richesse de plats chaleureux, réconfortants et complexes qui méritent d’être connus.

Ses aliments de base sont les fruits de mer, la viande (bœuf, agneau et chèvre), ainsi que les fruits, les légumes, les dattes et les olives. Et lorsqu’on parle de « cuisine nord-africaine », on fait référence à la nourriture et à la cuisine des pays du Maroc, d’Égypte, d’Algérie, de la Libye, du Soudan et de Tunisie.

Le Couscous, la Mloukhiya, la Chakchouka, le Kaftaji, la Ojja, la Nwasser, la Chorba Frik, la Qlaya, la Madfouna ou la Pkaïla, le Felfel mehchi, la market malah, la market loubia, le Tchich, la Makrouna Fell, la Kammounia, les Bricks, la Maakouda, les Akods, la Chmenka, le Mosli, la Chakhchoukha, la B’stilla, le Tajine, la Saucisse de foie de boeuf (semi-cuite), le Foul Medames, l’hamd Marakad, la soupe Harira, le Matboucha, les Mhadjeb ou la Mahjouba, le Djari bonois, le Méchoui, la Mrouzia, la Assida, la Sambossa, le Kosahri, le riz au lait égyptien, le Pain du palais de Saniora, Agneau aux épices, le Hawawchi, le Bazine, la Frittata, la Chermoula, la Khobbiza, les Hlalem, le Borghol et la Mhamsa sont les recettes nord-africaines les plus populaires.

Les barbecues au charbon utilisés pour les viandes, comme l’agneau, le poulet et la chèvre et d’autres qui prospèrent dans les terres arides, sont uniques à la région, construits étroitement pour économiser le carburant.

Le poisson, en particulier le thon, omniprésent dans les cuisines et la street food tunisiennes, est important dans les vastes zones côtières, et le pigeon est utilisé pour préparer des plats comme la B’stilla, une tarte salée.

La cuisine de rue comme le Lablabi (soupe de pois chiche relevée à la harissa, à l’ail et au cumin), le Kaftaji, le Fricassé, le « Shan tounsi » (plat tunisien), le casse-croûte tunisien, le Bambaloni, le Yoyo, la Ftira, le Sfenj, le Sohlob,  la Pizza carrée et la Coca à Alger, le Hkfaf et la Garantita à Oran, la Zlabia et les Mkharek, le Msammen, « El Choua » (les brochettes de viande), la Chawarma et les plats copieux comme le Kochari égyptien (un plat de lentilles et de riz) font partie de la vie quotidienne. Les petites assiettes à partager, comme la Slata Méchouia, la Ommek Houria et le Torchi en Tunisie ainsi que la trempette aux aubergines « Baba Ganousch » et le Zviti sont des amuses-bouche courants aux restaurant nord-africains.

Pour les pâtisseries, il y a la Baklawa, le Makroudh, Khobz Tounes (Algérie), le Boulou, le Kaak warka, l’Om Ali, la Mhallabia, les pierres de Carthage, le Boulou, le Rfiss, la M’hanncha, la Chabakia, le Baghrir, Kaab el-Ghzel, le Bechkito, les Feqqas, la Bsissa, la Zommita, le Sellou, la Rouina, la Besboussa, la Harisset Ellouz, la Ghraibet droô, la Homsia,la Bouza, la Zriga, le Zrir, le Mesfouf, la Madmouja, la Mahkouka, la Rkhaimiya, la Guizata, la Samsa, les Ktayefs, les Bricks de Mahdia, les Ouedhnine el Kadhi, la Bjaouia, le Halkoum, la Jeljlania, la Takoua, la Ourta, le Mlabess, la Halwet el-Mgharef, la Degla mehchia,…et la liste est encore longue.

Les boissons les plus populaires sont la citronnade, l’orgeat, le « gazouz cidre » (boisson gazeuse à base d’extrait de caroube), le thé à la menthe, le lait de coco, le l’ben (petit lait fermenté), la bière et le café (express allongé, cappucin, filtre, direct, etc.).

Nul doute, la gastronomie nord-africaine est une mosaïque influencée par plusieurs cultures: amazigh, arabe, ottomane, espagnole, italienne, orientale, etc. Elle a une longue histoire culturelle car elle est liée à d’anciennes routes commerciales vers l’Europe et l’Inde, et la région est à prédominance musulmane. C’est une cuisine riche en saveurs et en épices car elle abrite de nombreux grands marchés aux épices.

Afrique de l’Ouest

Dans les pays ouest-africains, les gens aiment la nourriture épicée. Ils mangent des repas riches en féculents, en viande, en épices (piment, gingembre, poivre), en fruits, en légumes et en saveurs. Les Africains de l’Ouest aiment aussi les haricots, les bananes plantain frites et les tomates. Les repas traditionnels sont le manioc, le gombo, le millet, le fufu, le kenkey, le banku, les patates douces, le gari, le poivre, les ignames, le maïs, l’arachide et le riz. Les saveurs vont de l’acide à l’amer en passant par le sucré.

L’Attiéké, le riz Jollof, le Thieboudienne, le Krain Krain, le Yassa, le pain de riz, le Amiwô, le beignet Akara, le Tukasu,la soupe Egusi, le Suya (soupe de viande), la soupe Efo, le Dêgué, la sauce Gombo, le Waakye, l’Alloco, le ragoût d’arachide ou Maafe, le Fufu, le riz au gras, le Tukasu, le Yétissé souvent accompagné de soupes et ragoûts, le Kedjenou, le Dambou et la Soupe Ogbono sont les recettes ouest-africaines les plus populaires.

Le poisson et les fruits de mer sont bien sûr populaires le long des côtes et il en existe d’abondantes sources. Griller, frire et cuire à la vapeur sont parmi les styles de préparation les plus populaires.

Les boissons les plus populaires sont le thé à l’hibiscus, le café, le jus de tamarin, la boisson au gingembre, le thé Atay, etc.

Bref, la cuisine ouest-africaine est une cuisine traditionnelle atypique qui varie d’une région à l’autre mais a un fil conducteur dans les types d’ingrédients utilisés. Au fil des siècles, la nourriture de l’Afrique de l’Ouest a été profondément influencée par les nations colonisatrices mais on peut encore retrouver des saveurs traditionnelles et un regain d’intérêt pour ces aliments traditionnels.

Afrique centrale

L’aliment fondamental dans chaque maison en Afrique centrale se compose d’amidons comme le manioc (également connu sous le nom de tapioca), les ignames, les pommes de terre et les plantains.

Leurs plats de viande (essentiellement de chèvre et de poulet) sont souvent marinés et en brochettes, avec des sauces épaisses à base de cacahuètes.

L’un des plats célèbres ici s’appelle le fufu, fabriqué à partir de manioc fermenté qui est utilisé pour les garnitures de barbecue.

Le Koki, le poulet Nyembwe, le Makara, le Poulet aux bananes plantains,le Kanda, le Muamba, le Liboke, le Ngai ngai ya musaka, l’Arroz doce, le Saka Saka, le Ndolé, la Daraba, le Mbongo tjobi, le Succotash et le Poulet DG sont les recettes centrafricaines les plus populaires.

La nourriture et les boissons qui accompagnent ces festivals sont généralement des aliments traditionnels. La cuisine en Afrique centrale représente une combinaison de fruits, de légumes, de viande et de lait.

Les boissons les plus populaires sont: la bière, le café, le thé à l’hibiscus, le thé, la boisson au gingembre et les vins.

Les habitants de cette région mangent aussi des insectes comme les chenilles, les termites et les vers, ainsi que les amandes et les champignons. Et les tribus des zones rurales consomment également des singes, des gazelles, des antilopes et des sangliers.

Une chose est sûre: dans cette partie du Continent, la cuisine est riche et variée du moment qu’elle est le fruit de différentes traditions et cultures.

Les produits agricoles phares dans les pays centrafricains sont: l’oignon, le sorgho, l’igname, l’ail, les épinards, le mil, l’huile de palme, la banane, le gombo, le sésame, le riz et l’ail.

En revanche, les cultures d’origine américaine et les produits importés englobent la patate douce, le piment, le manioc, les arachides, le maïs et la tomate.

Afrique de l’Est

Avec un délicieux métissage d’influences arabes, indiennes et portugaises, les cuisines de l’Est utilisent un assortiment d’épices (coriandre, clou de girofle, piment, curry et poivre noir), de céréales, de riz, de blé, de millet, d’igname, de haricots et de niébé, de farines pour le pain, notamment de sorgho, de maïs, de manioc et de ragoûts cuisinés avec de la viande et des légumes.

Le beurre frais et le lait frais sont omniprésents dans de nombreux aliments authentiques d’Afrique de l’Est, notamment le lait de coco.

L’aliment le plus répandu dans toute l’Afrique de l’Est est l’Ugali.

Outre, le fameux Ugali, en Afrique de l’Est, on prépare d’autres plats très populaires tels que: le Matoké, le Tilapia, le nyamachoma, l’Isombé, le Chapati, le fah-fah, les Sambusas, le Kashata, l’Injera, la sauce binyebwa et le Doro Wat.

En effet, dans cette région, en raison des influences religieuses et ethniques, des contacts de ces populations indigènes africaines avec les Arabes de la Corne de l’Arabie et du monde africain, les mets sont variés et hauts en couleurs.

Les boissons les plus prisées sont le Dawa, le chai, le café, le jus de Tamarin, l’eau de coco, la bière, etc.

La richesse du répertoire gastronomique de l’Afrique de l’Est reflète sa faune et sa flore exotiques et surtout diversité ethnique et culturelle à travers un peuple chaleureux et amical, des espèces végétales et animales exotiques.

Afrique australe

Les mets de cette régions sont le résultat d’un mélange d’influences de tribus autochtones et indigènes, de cuisines européennes et de cuisines asiatiques avec l’influence de la communauté indienne.

A l’image des Zoulous, on dénombre tribus autochtones en Afrique australe, chacune avec sa propre culture, sa langue et son style de cuisine.

Les habitants de cette zone géographique cultivent des légumes verts à feuilles, des citrouilles et des haricots.

Dans certaines parties de l’Afrique australe, en particulier en Afrique du Sud, au Zimbabwe, en Namibie, au royaume d’Eswatini et au Botswana, la viande bovine a une place de choix dans les célébrations locales : le braai (barbecue) est très prisé.

Les recettes les plus populaires dans les pays de l’Afrique australe sont: le Chakalaka, la Nshima, le Kapenta avec Sadza, l’Oshithima, le Potjiekos, le Poulet Péri-Péri, le Romazava, le bobotie, la soupe Butha-buthe, le Pilao, le Biltong, le Dikgobe,le Biryani, le Boerewors, les Dholl Puris et Rotis, le Bunny Chow, le Slaai, le Pudding, le Chambo, le Koba akondro, le Sept Cari, le gâteau Bolo polana, le Tofu, le Madaba, le Seswaa, la Rougaille et l’Ifisashi.

Le sorgho, le millet, le blé, le riz et le maïs sont les aliments de base des cuisines de cette région méridionale.

Comme dans beaucoup de pays, le pain a également une place importante dans les pays d’Afrique australe, notamment le pain de maïs (en particulier) et le pain à base de farine de blé. Ils sont consommés suivant plusieurs variétés et régulièrement servis avec le plat principal.

Pour le dessert, avec l’influence de la colonisation britannique et la présence des Afrikaners en Afrique du Sud (des Sud-africains blancs d’origine néerlandaise, française, allemande ou scandinave qui s’exprime dans une langue dérivée du néerlandais du XVIIe siècle) les biscuits secs, les scones et les boulettes sucrées accompagnent généralement le thé au lait.

Les boissons les plus populaires sont le thé, les vins, le café et la bière.

Assurément, comme l’a si bien dit l’ex-président ghanéen Kwame Nkrumah dans l’un de ses discours:

« Nos ressemblances font plus que contrebalancer nos différences. L’Afrique est très diverse, mais cette diversité ne doit pas être un alibi pour ne pas penser son unité. »

Alors, loin des sujets clivants de la géopolitique, faisons de nos produits des terroirs africains et de notre diversité gastronomique… un atout unificateur sur fond d’un panafricanisme culinaire.

Cuisiniers et foodies du Continent, dressons les banquets de l’amitié africaine !


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